samedi 16 mai 2009



Réactions dans la salle
(Interventions territoriales, clause de compétence générale)



Stéphane Brizé

Je vais témoigner de mon expérience. Je monte actuellement mon quatrième long-métrage. Depuis mes débuts, je travaille avec des petits budgets. Je n'ai jamais obtenu aucun préachat d’une télévision hertzienne, mais tous ces films se sont faits grâce à l'intervention des Régions, sans lesquelles je ne ferais pas de film. Leurs aides représentent une part importante du financement de mes films. Sur le dernier film, il a fallu trouver un coproducteur car les budgets augmentent tout de même peu à peu au gré des films. Or, le type de film que je fais peut ne pas se faire à 200 ou 300.000 euros près. Ca représente environ 10% du budget.

Les grosses manifestations, elles, existeront toujours. Certainement parce que, localement, elles rapportent de l’argent aux commerces etc. Par contre, les actions moins visibles sont menacées : les actions très concrètes comme le cinéma à l'école, le cinéma en prison etc. qui ne peuvent pas être quantifiées, évaluées par un chiffre. Certaines ont disparu, d’autres vont continuer tant bien que mal à faire des choses. Évidemment, le bénéfice d’un enfant que nous éveillons à la culture, ce n'est pas quantifiable, par contre les dégâts de l’ignorance le sont : la violence que ça engendre plus tard… Et la disparition de ces budgets favorise l'inculture et la méfiance.

Les associations créent du lien social, comme un maillage, c’est un filet. Alors, pourquoi les représentants politiques ont-ils autant l’envie de casser quelque chose qui fonctionne ? Sur tous les fronts, ce n'est que réduction de budgets, disparition d'aides... Il ne s'agit pas là de défendre des intérêts catégoriels. Nous parlons ici de circulation d'émotions, de circulation des idées, de la pensée. Les sommes ne sont pourtant pas si élevées que ça : nous parlions de 5 millions d’euros, mais qu’est-ce que c’est que 5 millions d’euros ? Le problème n'est pas un problème d'argent, mais un problème idéologique. Et je me pose la question pour terminer : ça dérange qui que la pensée circule ?

Stéphane Brizé est réalisateur