samedi 16 mai 2009


Discussion sur l'éducation artistique : ouverture des catalogues et hors temps scolaire


Jean-Pierre Daniel

Hier, notre réunion s’est terminée par l’expression d’une certaine colère et du besoin d’une prise de conscience de la gravité de la situation. Dans la description de l’action culturelle que vous donnez, vous oubliez que nous – les acteurs de terrain – ne sommes pas unis : il y a des divisions entre nous. Et nous savons que nous avons à nous battre contre ces divisions. Je considère par exemple que la non adhésion au Blac de l'AFCAE – Association française des cinémas d’art et d’essai – est tout à fait dommageable.

Certains revendiquent que la logique du marché domine l'action culturelle. Vous dites, monsieur Auclaire, qu’il n’existe qu’un seul marché, qu’il ne faut pas séparer l’économique et le culturel, que vous ne voulez pas de cette dichotomie, que vous luttez contre, c’est pourtant un point essentiel qui ne va pas de soi. La vraie question, au sujet des fonds de soutien, n’est pas celle des pourcentages, des clés de répartition entre l’aide automatique et l’aide sélective, des aménagements techniques mais plutôt celle de son sens originel à retrouver, qui a été de permettre une régulation sous le contrôle de l’Etat des logiques marchandes. Donc oui la logique marchande est au cœur de notre débat et le titre de votre rapport qu’un certain nombre d'entre nous ont pris comme du mépris : le cinéma est par ailleurs un divertissement nous y ramène.

Selon vous, nous aurions donc besoin qu'on nous rappelle que le cinéma est un divertissement dans la mesure où notre travail serait, en quelque sorte, un processus qui ne serait pas conscient du plaisir qu'il y a à rencontrer des œuvres d'art et représenterait ainsi un frein à l’industrie du loisir cinématographique !

Sur la question des programmes des dispositifs et de l'ouverture des catalogues, ce que vous suggérez c’est bel et bien de transformer ces dispositifs en simples « offres » culturelles. Pour qu'il y ait plus d'enseignants et donc plus d’élèves spectateurs, vous proposez de rendre moins « difficiles » les catalogues. Mais c'est absolument ça la logique marchande : c'est effectivement de réduire l'action culturelle à un marché basé sur l’offre et la demande. Et on est en train, progressivement, par des réformes – y compris par des réformes qui sont censées aller dans le sens de l’action culturelle comme celle de l’art et essai, de favoriser cette intégration.

L’action culturelle donne du sens à l’intervention publique, à l’utilisation des fonds publics, tel que le soutien à la création artistique. Or, c’est cette création – et la rencontre de cette création avec le public – qui est au cœur de l'action culturelle. Ceci n'est pas au centre de votre rapport, ce qui ne vous permet pas d’établir un état des lieux satisfaisant et de savoir qui, aujourd'hui dans ce pays, porte cette relation-là à la création artistique, dans une action non marchande.